RENCONTRE AU SOMMET KATHERINE CHOONG Tu as évoqué ta taille. Tu mesures 160 cm ? Non, malheureusement seulement 158 cm. La considères-tu comme un inconvénient dans les voies difficiles ? La taille rend certaines voies plus difficiles, mais être trop petit n’est pas une excuse. Cela peut également être un avantage. En Coupe du monde, certains sont même plus petits que moi. Mais il est vrai que pour « Jungfraumarathon », ma deuxième voie en 9a, je n’ai pas réussi certains mouvements en raison de ma taille. Pour finir, tu y es tout de même parvenue. J’ai cherché des prises que je pouvais facilement atteindre. Et j’ai finalement réussi. Cette voie m’a surtout sollicitée mentalement. Tout a tellement traîné en longueur. J’ai foulé la « Jungfraumarathon » en octobre 2018 pour la première fois. Puis, l’hiver est arrivé. Au printemps, je suis parvenue à mon- « C’est vraiment un beau coin. » Choong dans « Gimmelexpress », 8c+, dans le site d’escalade de Gimmelwald. Plut tôt, tu as dit que la « Cabane au Canada » t’avait motivée car c’était une voie de 9a. Avec cette voie, tu as prouvé que tu étais la meilleure grimpeuse suisse du moment. Je vois surtout mes projets en rocher comme un défi personnel. Pour l’instant, il s’agit de cela et de rien d’autre. Bien sûr, je suis contente d’être la première Suissesse à avoir réussi un 9a, même si je suis certaine qu’il existe d’autres femmes aussi fortes que moi qui n’ont tout simplement pas encore tenté un 9a ; peut-être parce qu’elles se concentrent sur autre chose, comme la compétition ou les voies de plusieurs longueurs par exemple. Réussir un 9a ne signifie donc pas que je suis la meilleure grimpeuse suisse. Je suis d’avis que les grimpeurs sur rocher prennent bien trop au sérieux ces degrés de difficulté, qui sont subjectifs en réalité. Ils sont capables de discuter durant des heures pour savoir si une voie est un 9a ou un 9a+. Qu’est-ce qui fait la différence selon toi ? S’il s’agit d’une première ascension ou non. Les personnes qui répètent une voie savent qu’ils peuvent la faire. Cependant, beaucoup de paramètres peuvent changer, ce qui rend la comparaison difficile. La météo a une grande influence et peut modifier la situation. Si une voie a été beaucoup parcourue et qu’elle est patinée, ou si une prise a cédé, cela fait également une grande différence. Pour moi, les véritables comparaisons ne sont donc possibles que sur un mur artificiel, sur la même voie, durant la même journée. Et que penses-tu des catégories comme la « First Female Ascent » ? Je dois avouer que, rien qu’en raison de ma taille, lorsqu’une femme réussit une voie, celle-ci me semble plus accessible. En outre, si la mention « FFA » apporte une meilleure visibilité au succès et qu’elle encourage les femmes à tenter des voies plus difficiles, c’est probablement une très bonne chose. « C’est vraiment très difficile de ne pas parvenir à progresser. » « Les grimpeurs sur rocher prennent bien trop au sérieux ces degrés de difficulté, qui sont subjectifs en réalité. » ter très haut, mais j’échouais toujours au même endroit. C’est vraiment très difficile de ne pas réussir à progresser et, à ce moment-là, j’ai vraiment eu de la peine à rester positive. J’ai appris la voie par cœur, tenté de me souvenir de chaque mouvement. Finalement, ce que j’ai ressenti en haut de la voie a été fantastique. Angy Eiter, première femme à avoir réussi un 9b, avait recopié cette voie en salle afin de pouvoir s’y préparer au mieux. Fais-tu aussi ce genre de choses ? Oui, bien sûr, je travaille certains mouvements difficiles en salle. En fonction de ce qui m’attend, j’essaie de suivre un entraînement parallèle pour les compétitions et pour mes projets en rocher. En salle, il s’agit principalement de force et d’explosivité pour les mouvements dynamiques. Je m’y entraîne avec un campusboard, un hangboard ou en bloc no foot, qui consiste à escalader sans s’aider des pieds. Avec l’équipe nationale, on peut s’entraîner trois fois par semaine en salle à Bienne. J’y vais deux fois par semaine. Et mon copain a un mur d’entraînement simple chez ses parents sur lequel je peux m’entraîner. En outre, il existe depuis peu un autre spray wall, dont je me sers également, chez le fabricant de prises « Flathold », à Moutier. De plus, les compétitions sont aussi utiles pour les voies d’escalade sportive et les voies de plusieurs longueurs. Devoir grimper de nombreuses voies en un jour, comme c’est le cas durant les compétitions, améliore l’endurance. Et surtout, les compétitions nous apprennent à gérer la pression et le stress. Mais, pour moi, l’escalade en rocher incarne en soi un bon entraînement qui me procure endurance et force dans les doigts. PHOTO : RAINER EDER 40 INSPIRATION 02 / 2021 41
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