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Inspiration No 3 - 2021

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RUBRIK UNTERRUBRIK BON PLAN LAUTERAARHORN Le Lauteraarhorn est considéré comme le quatre mille le plus isolé des Alpes suisses. Rien que l’accès à l’Aarbiwak dure un jour entier. En rejoignant directement la route du col du Grimsel depuis le sommet, on a des chances de réaliser la plus longue course de sa vie. Et les impressions qu’elle laisse sont si profondes qu’on croirait avoir marché pendant des jours au cœur de la nature. TEXT & PHOTOS CAROLINE FINK UNE TRÈS LONGUE COURSE Au matin d’une très longue journée de course : les deux alpinistes semblent minuscules sous l’impressionnant 36 Finsteraarhorn. INSPIRATION 03 / 2021 Nous nous trouvons un peu en-dessous du col du Grimsel, le long de la route. Il pleut. Le ciel est aussi gris que les sommets de granite et le barrage du Grimselsee. Les prévisions ne sont pas bonnes pour une montée à l’Aarbiwak. En clair, nous devrions marcher sept à huit heures sous la pluie et – après une courte nuit – remettre nos vêtements mouillés pour monter sur le Lauteraarhorn, à 4042 mètres. Comme nous disposons de trois jours, nous modifions nos plans à la dernière minute : nous marcherons sous la pluie jusqu’à la Lauteraarhütte, à mi-chemin. Le lendemain, plutôt que de rejoindre le sommet, nous nous arrêterons au bivouac. Le troisième jour, nous relierons à grandes enjambées le sommet, puis la route du col. Pour être honnêtes, nous ne calculons pas précisément la durée du troisième jour de course. Tout ce que nous savons, c’est qu’il sera long. En effet, le Lauteraarhorn est considéré comme le quatre mille le plus isolé des Alpes, entouré de coulées glaciaires et de sommets évoquant un Karakoram en modèle réduit. Rien que le chemin à la Lauteraarhütte offre matière à rêver de montagnes, et cela malgré la bruine. Soudain, les nuages se déchirent et les eaux émeraude du Grimselsee scintillent en dessous de nous. Le rose des lis martagon se détache du vaste terrain alluvial fait de gravier et de sable, tandis que les sommets de granite se dressent autour de nous, leurs dalles si lisses que le rocher semble encore liquide. Les grimpeurs ont baptisé une de ces parois Eldorado, un lieu très prometteur, traversé depuis les années 1980 par des voies d’escalade légendaires, telles que Motörhead et Septumania, ouvertes par les tout aussi légendaires frères Rémy. Aujourd’hui, on y vient surtout pour la Lauteraarhütte, qui s’accroche aux falaises de granite tel un nid de faucons et rappelle l’époque des pionniers. Les casseroles fument dans la minuscule cuisine ouverte, si petite que nous mangeons dans le séjour boisé en compagnie des gardiens et d’une poignée d’hôtes. De temps à autre, je jette un coup d’œil par la fenêtre en direction des puissants flancs neigeux et rocheux. Entre les nuages apparaît un sommet qui semble suspendu entre le ciel et la terre : le Lauteraarhorn. C’est dans cet univers que nous nous immergerons au cours des jours suivants. La région est si sauvage que je m’y sens encore comme une étrangère. Ici, le crissement de la glace sous nos pas, là le tintement des éboulis, semblable à celui de fragments de porcelaine. Nous monterons toujours plus loin le long des langues glaciaires, dans des combes recouvertes d’éboulis, sur les flancs de glace, le long de cours d’eau où bruissent les eaux de fonte avant de disparaître abruptement dans les moulins glaciaires tonitruants. L’HÔTEL FAIT PLACE À UN BIVOUAC Les chercheurs ont commencé à s’intéresser à cette région il y a 200 ans. Des géologues, glaciologues, physiciens et leurs guides y ont construit une cabane, aguillée entre deux blocs de rocher sur le sommet d’une moraine et entrée dans l’histoire alpine sous le nom d’Hôtel des Neuchâtelois. Les chercheurs ont également signé quelques actions alpines historiques : par exemple, celle d’Arnold Escher von der Linth, qui a voulu réaliser, le 8 août 1842, la première ascension du Schreckhorn avec deux compagnons et cinq guides et qui a atterri, à la place, sur le Lauteraarhorn. Ainsi, le groupe a tout de même réussi la première ascension du sixième sur les 48 quatre mille suisses. Lorsque nous atteignons le Strahlegggletscher, nous bénéficions du même spectacle que les pionniers : les imposantes pyramides rocheuses du Finsteraarhorn et du Lauteraarhorn 37

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